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L'Homme de Porquerolles - William Luret


Les îles ont souvent des légendes fascinantes à nous conter, et le petit paradis qu'est Porquerolles n'échappe pas à la règle. La mythologie rappelle que lorsque les trois filles du Roi Stoechos furent enlevées par des pirates, le peuple pria si fort qu'il parvint à attendrir l'Olympe. Elles se métamorphosèrent, faisant éclater la nef de leurs ravisseurs, en trois îles : la première, la plus intrépide, l'île du Levant, derrière, Port-Cros la secrète puis la dernière, "l'aînée, la préférée qui semblait tendre encore les bras vers son père hurlant son désespoir en haut de la Tour Fondue" . Porquerolles. L'Histoire a elle aussi marqué l'île de son empreinte : marins grecs, moines, flibustiers, contrebandiers, Sarrasins, Marie de Médicis, Bonaparte ... tous ont accosté sur ses rivages enchanteurs, mais Porquerolles semble n'avoir jamais voulu des hommes.


A l'exception d'un, dont le nom résonne encore sur son île mais loin des souvenirs de la métropole : François-Joseph Fournier, Crésus des temps modernes. Mais ce n'est pas l'argent qui fit de ce chercheur d'or "l'Homme de Porquerolles", plutôt un flair et un goût pour le labeur qui rarement rencontrèrent de résistance. François Fournier est né pauvre : fils d'un batelier, il vécut son enfance le long des canaux belges à transporter du charbon, tout en rêvant machinerie, ingénierie et chemins de fer naissants. Il quitte la Belgique pour Paris à vingt ans, tourne le dos à la Gare du Nord et laisse éclater sa soif de sciences. Mais, tourmenté par ses origines sociales, François vit des heures difficiles : il se voit déconseiller l'accès aux conférences du Conservatoire des Arts et Métiers en raison de la pauvreté de ses vêtements et peine à se sentir à son aise dans les dîners mondains qu'organise pour lui son ami Bourdin, fils d'un riche ingénieur. Fournier est cependant quelqu'un qui semblait inspirer confiance : repéré, protégé par des magnats de l'industrie, il avance ses pions dans le monde et n'hésite pas à s'embarquer pour le Canada en 1883 sur le chantier du Canadian Pacific Railway. Il y fait sauter les roches et ouvre un chemin dit impraticable au tout nouveau chemin de fer. Puis ce sera le canal du Panama, San Francisco et enfin le Mexique. Il parvient à financer ses mines et se fie à son flair, découvrant là où personne n'était allé un des plus vastes filons d'or du pays. C'est désormais un homme riche, l"homme aux 400 millions", et dont la fortune ne semble avoir aucune prise sur son tempérament. Mais il est pauvre d'enfants, ce mal le ronge. De retour à Paris, il divorcera de sa première femme pour épouser une mondaine, dont il divorcera également, et fera enfin la rencontre de Sylvia. Et pour cadeau de noces, une île ... « Cette fois, enfin, le lent voyageur était arrivé au port. Il avait marché toute sa vie, "de son pas de braconnier", des canaux de Belgique aux neiges du Canada, des boues de Panama aux flancs de la Sierra, parce que c’était le chemin qu’il devait suivre pour atteindre son royaume. Et ce royaume, ce n’était pas un château, ce n’était pas sa montagne d’or, ce n’était pas un pont de bois jeté au-dessus d’un précipice, c’était une île, son île. Ulysse avait trouvé son Ithaque. » C'est la sauvage Porquerolles qui va lui offrir la consécration de ses idéaux : un royaume de justice, de sérénité, fonctionnant en parfaite autarcie. Il réussit à fonder une société idéale, plante des vignes et des cultures, introduit du bétail et des biches sauvages, impose une coopérative où chaque vendredi des paniers de victuailles sont offerts aux villageois. Il subvient aux besoins des îliens comme s'il était leur père, comme un nouveau roi Stoechos revenu prendre soin de sa fille. « Porquerolles avait retrouvé son innocence. François Fournier n’essaierait pas de la dompter ; il l’apprivoiserait. Il apprendrait à l’île qu’elle pouvait vivre en paix en offrant aux hommes qui le mériteraient ses richesses cachées. Et lui, il l’aiderait. Sa fortune immense s’était enfin trouvé un but : faire de Porquerolles un royaume heureux, loin de la misère qu’il connaissait si bien, et loin de l’injustice. » Et si on peut vous promettre une chose à la sortie de ce livre, c'est l'envie d'un aller-simple pour Porquerolles, de mettre vos pas dans ceux de François Joseph Fournier, le long des pins parasols.

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